*{__ Pour ceux qui brillent sur nous... |PV|

S

L

Le vent soufflait doucement, toujours comme s'il ne pouvait s'arrêter. Mais il était à peine sondable dans la nuit, simple caresse d'un autre temps. Allongé sur sa couchette, un chat crème rayé de caramel aux pattes et au poitrail blancs était immobile, les yeux ouverts. Son regard était dans le vague, tandis que doucement, les cris de son enfance se répercutaient. Comme des hurlements d'insomnie. Il songeait toujours aux nombreux incidents dont ses camarades avaient été victimes. Il se rappelait leurs noms, mais au fur et à mesure que le temps passait, leurs visages s'effaçaient de sa mémoire, douloureusement, silencieusement... Mais à qui pourrait-il, de toute façon, partager cette tristesse ? Tous le connaissaient comme le joyeux, voir même turbulent lieutenant téméraire mais sage, amusant mais noble.
Se levant enfin sur ses solides mais courtes pattes, il observa autour de lui. Les autres étaient bien plus grands que lui mais leur carrure aurait été bien faible comparée à celle de son ami perdu... Son cœur se serra amèrement à la pensée du novice au pelage gris unicolore. S'il avait été là, il lui aurait dit de ne pas s'inquiéter, que de toute façon le clan des Etoiles ne pouvait pas leur faire à tous du mal, qu'il n'était pas stupide à ce point... Oui, lui qui était si ouvert, toujours là pour montrer le chemin aux autres, toujours là avec son optimisme. Qui l'avait perdu. Naïf, il avait cru que jamais ses fautes, mêmes infimes, puissent un jour lui retomber dessus. Il avait tort. Sa curiosité, sa naïveté l'ont tuées. Et même lui, son meilleur ami, n'avait rien pu faire cette fois-ci pour le sauver...
Ange des Songes soupira et se retira, marchant dans la nuit. Au milieu du campement, tout était silencieux. Les étoiles parsemaient le ciel et observaient. Sur des lieues et des lieues de cela... Le jeune lieutenant rabaissa les yeux. Savoir que le clan des Etoiles observait leur mort le désespérait. Comment ce clan dit si noble pouvait-il causer la perte de leur propre descendance ?... A cette idée, ses yeux se voilèrent légèrement. Ses parents, en faisaient-ils partie ?... Ou bien étaient-ils toujours en vie, finalement ? Qui sait, en vérité... Tout s'était passé si vite, personne n'avait rien vu venir.
Le matou rayé se dirigea instinctivement vers la rivière. Il était étrange, pour un chat de ce clan. S'il aimait nager, il préférait le petit gibier aux poissons. Il faut dire, peut-être tenait-il cela de ses origines... mais quelles origines ? Ange des Songes plaqua les oreilles à cette idée. Non, il appartenait bel et bien au clan de la Rivière. Quels que soient ses différences. Se glissant dans les lieux silencieusement, il se figea cependant en sentant une odeur, légère. Presque ambigu. Là, dans l'étonnement du jeune lieutenant, une chatte qui devait être pas bien plus petite que lui se tenait là. Le lieutenant reconnut facilement un apprenti, il faisait la taille de la plupart d'entre eux. Tout petit, mais solide...
Ange des Songes ne mit pas longtemps, dans l'ombre, à reconnaître Nuage du Silence. Il ne lui avait jamais vraiment parlé mais il savait que la petite était un peu à part des autres. Elle n'était pas aussi joueuse que les jeunes de son âge. Elle n'était pas aussi rieuse que tous. Non, un silence l'envahissait. Il ne savait pas grand-chose d'elle, sinon que, parait-il, elle n'aurait plus de famille. Ange des Songes n'essaya pas d'y penser plus, il aurait trop peur - lui, peur ? - de se retrouver avec de nouveaux souvenirs pas très accueillants. Il se glissa donc à sa rencontre.
Il était étrange qu'une novice, enfin une chatonne n'ayant pas encore eu de mentor, se balade ainsi en pleine nuit. Et quitte le campement, seule. Ange des Songes ne faisait jamais la morale à quiconque, au contraire. Il se demandait à quoi elle devait penser, là, tandis qu'elle semblait observer le ciel. Doucement, il se redressa, et s'arrêta juste derrière elle. L'avait-elle entendu ? Sûrement. Le jeune lieutenant posa son arrière-train sur le sol et, sans commentaires, leva le museau au ciel pour observer à son tour les étoiles... Les étoiles. Le clan des Etoiles... la fin...

La petite chatte grise regarda le lieutenant se poser près elle, levant à son tour la tête vers le ciel. Il devait se demander que faisait-elle, au cœur de la nuit, ici à la rivière. Mais cela ne dérangeait pas Sylence, elle savait qu’elle n’avait pas le droit de sortir la nuit, cependant, elle ne pouvait vivre sa vie comme les autres. Contrairement à ses camarades, elle aimait plus la nuit que le jour, le calme plutôt que les bruits. Et contrairement aux autres, elle n’aurait pas parlé au jeune lieutenant pour tuer le calme. Non, elle préférait que si c’était mieux de parler que ce soit l’autre qui commence, c’en est toujours ainsi, et rarement Nuage de Silence parlait. Son nom lui allait bien, c’était un drôle de hasard. Quand elle était née, elle était loin de se taire… C’est si injuste, pourquoi avoir enlevé la vie à Ciel? Pourquoi lui? Elle se rappelait des rires bizarres de son frère. Il avait toujours plein d’amis, oh elle aussi en avait eu quelque uns. Mais avec Ciel c’était… différent. Tout le monde le trouvait sympa et super drôle. On l’appelait le magicien. Et c’était bien décidé comme nom, il arrivait à faire voler choses et même par la suite, personnes. Il disait que c’était truc de magie et que jamais il ne le dirait. Mais entre les deux, ils savaient que c’était un «pouvoir». Les deux c’étaient promis de rien dire à leur mère, sachant qu’elle leur défendrait d’en utiliser. Mais c’était assez dure, leur mère savait tout, on dirait près que un pouvoir, quand elle était triste, elle le savait, quand Ciel était en colère, elle le savait. Peut être était-ce un pouvoir aussi. Si oui, ce serait cela qui l’aurait tué. Oh Ciel, il savait mettre la joie la où elle n’existait pas. Il était le soleil dans sa vie, et sa mère l’équilibre parfait de ce bas monde. Seulement, maintenant, le soleil est partie, et tout semble aller de travers.

Elle savait, elle vivait dans le passé… car il est bien plus beau que le présent. Elle jeta un regard au lieutenant du coin de l’œil. Si sa mère était toujours là, elle serait à sa place, et aurait sans doute le même âge que lui. Contrairement à ce que beaucoup pensent ou disent, Sylence ne pleure pas. Non, elle n’avait pleuré une fois et c’était le soir. Ce soir la, ou tout a changé. Jamais elle ne versait de larmes depuis. C’était bizarre, ce n’était pas qu’elle se retenait, mais comme si elle avait déjà pleuré toutes les larmes de son corps, comme s’il n’en restait plus. Mais c’était tant mieux, pourquoi pleurer? Pourquoi paraitre si faible? Certes oui, elle était vraiment étrange. Tous les petits et apprentis pleurent, pour une égratignure, pour une entorse, pour une épine… mais pas elle. Car elle a connue pire. Quand on se blesse, un vieux truc, nous faire mal ailleurs. Mais elle c’était toujours, toujours ainsi. La souffrance de son âme lui faisait oublier la douleur du corps. Quand on lui demandait pourquoi elle était toujours si triste et n’aimait que le silence, elle répondait, qu’elle ne savait pas. Mais Sylence le savait. Elle n’aimait pas les cris, pas les bruits, car ca lui rappelait Ciel. Et entendre ce vacarme sans voir son frère était comme nager sans eaux. Ce n’était que de la souffrance, comme si on essayait de lui poser un mirage, une illusion. Depuis ce soir là, Sylence est devenue susceptible, pas juste un peu. Elle ne se laisse de loin, pas tentée par tout ce qu’on lui offre. Car ce qu’elle avait était tout ce qu’il y a de mieux, de plus beau, et la vie ne sera pas prête à lui redonné. Mais ca, elle ne l’avait dit a personne. Personne ne doutait de son amertume sur la vie…

» # Pour proposer un personnage
» # Pour faire votre pub